Purple Rain ft Sagong Lan

Chaque fois que je me réveille, j'espère de la nouveauté. Hélas, le décor demeure inchangé et mes prunelles se posent systématiquement sur ce plafond blanc. Les odeurs de corps, de médicaments me déplaisent. Depuis combien de temps suis-je ici déjà ? Ma tête se tourne vers les marques que je fais avec mon ongle derrière la tête du lit. Quatre putains de jours… C'est beaucoup trop long. Seulement, il ne m'a pas été autorisé de sortir à cause de ce que j'ai sur l'abdomen. Je me demande comment ces blessures ont bien pu être faites et par qui. Enfin ce n'est pas la seule chose qui me laisse perplexe et interrogateur : cette absence de souvenirs. Le type avec sa blouse m'a dit m'appeler Ares, mais cela ne me dit rien du tout. Tout comme il m'est impossible de me rappeler de ma vie avant d'avoir ouvert les yeux ici. C'est impensable de ne pas avoir de famille, ou moins des parents ou des grands-parents, parce que sans eux, je ne pourrais pas être ici.

Ma vessie m'intime de la vider, ce qui m'oblige à m'extirper du lit et me diriger dans les toilettes. Une fois que c'est chose faite, un détail attire mon attention. Qu'est-ce que tous ces trucs sur ma peau… ? Je passe les doigts dessus. Eux non plus ne me disent rien. Il faut croire qu'avant je devais apprécier vu leur nombre. Alors que je me mets en quête de vérifier si j'en ai partout, quelqu'un frappe et entre. Ce ne sont pas une, mais deux personnes qui pénètrent dans la pièce. Encore des blouses. « Mets ça. » Dit l'un d'eux d'une voix sèche en déposant les vêtements sur le bas du lit. Si je décide d'obéir, c'est que cela ne me plaît pas des masses d'avoir les fesses à l'air. Les contournant, je les enfiles. Pas assez vite au goût du second. « Magne-toi, on n'a pas toute la journée... » Maugréa l'autre.

Cela aurait pu se passer dans le calme s'il ne m'avait pas bousculé comme pour affirmer son autorité. Ne me demandez pas comment, mais avant que je ne le réalise, mon poing était parti dans sa mâchoire et ensuite je me suis retrouvé au-dessus afin d'en donner d'autres. C'est là que le premier s'est mêlé à l'histoire. Deux contre un, les lâches. J'avais beau me défendre comme un beau diable, c'est mon corps et ses trois blessures qui m'ont trahi les enfoirés. Quand on dit qu'on ne peut avoir confiance en personne. Ensuite, ils m'ont rendu la pareille, sans me marquer au visage. Vidé du peu de forces qu'il me restait, ce sont des menottes qu'ils m'ont enfilé aux poignets. « Tu as intérêt à ne pas bouger, sinon tu n'aimeras pas ce qu'on te fera. » Me menaça l'un d'eux avec un petit rictus mauvais.

À l'extérieur de la pièce, ils se sont mis de part et d'autre de moi au cas où. Un nouveau cri d'effroi se fait entendre plus loin. Décidément, ça fait froid dans le dos tout ça. Mon regard se pose partout où il le peut. Quel est donc cet endroit ? Qui sont ces gens ? D'où viennent ces hurlements ? Au détour d'un couloir, une autre chambre à la porte close, mais aux bruits équivoques. Il y a vraiment des tordus dans ce truc… Je me surprends parfois à poser les yeux à des endroits plus qu'étranges, à mémoriser certaines d'entre elles., comme ce symbole sur le badge des employés. Mais la balade s'avère être plus courte que prévu, me voilà arrivé à ma destination.Ils frappent et m'obligent à pénétrer à l'intérieur. De l'autre côté se tient une petite bonne femme, encore une blouse. « Nous vous l'avons amené Doc. » Dit l'un d'eux. Mes prunelles se posent une seconde sur chacun de ses visages avec des hématomes, ça leur fait les pieds. Ils s'en vont, rendant l'air plus supportable d'un seul coup. J'attends de ne plus entendre leurs pas avant de parler. « Qui êtes-vous ? Qu'est-ce que je fais ici ? » Demandais-je sans la moindre formalité, si ce n'était le vouvoiement.

Purple Rain

Ares & Lan

Un nouveau matin vient de se lever, Séoul se remet encore des dernières tournées de la veille, les businessman tanguant dans leurs costumes impeccables. Encore engoncée dans les limbes du sommeil, la brune dort pour une fois paisiblement. Sans doute que les cachets sur sa table de chevet n'y sont pas étrangers. Elle qui exécrait ces subtances néfastes pour le cerveau et en tenait ses patients le plus loin possible, la voilà devenue consommatrice régulière. Il faut dire que les insomnies de Lan s'étaient révélées être particulièrement fortes ces derniers temps et la chirurgienne peinait à suivre la cadence. Elle avait bien essayé la Lamaline dans un premier temps, mais l'effet décontractant n'était pas assez fort. Quant à freiner sur le café... C'était peine perdue. Toutefois, la brune espérait bien pouvoir arrêter le plus vite possible cette substance qui ne faisait que masquer le problème. L'on conseille aux malades de supprimer autant que possible les contrariétés afin de retrouver un sommeil paisible, mais comment arriver à pareille prouesse dans le monde moderne avec nos modes de vie encore et toujours plus anxiogène ?

Un son strident retentit alors, sortant avec la délicatesse d'un bulldozer du téléphone de la fleur posé non loin. Un grognement plus tard et un étirement en règle, Lan était parée pour filer sous la douche. Enfin, avant, elle avait lancé sa cafetière afin que son doux breuvage préféré puisse l'accueillir et finir de la sortir des bras de Morphée qu'elle n'avait guère envie de quitter... Il y a un peu plus d'un an de ça, Lan n'aurait pas cru la personne lui affirmant qu'elle ne voudrait pas se rendre au travail.... Et puis, le temps avait coulé, à l'image du jet brûlant qui ruisselait sur ses courbes. Devenue médecin de l'horreur, elle avait détourné honteusement le regard du serment d'Hippocrate. Certes, elle avait sauvé Zhihao, mais à quel prix.... Elle espérait bien que son enfant n’apprenne jamais par quel jeu tordu il s'était retrouvé en haut des listes de receveurs. Sinon, lui aussi devrait vivre avec le sang d'innocents sur les mains, la fleur préférant en prendre l'entière responsabilité. Là n'était pas le rôle des parents ?

Sa peau débarrassée de ses impuretés et lovée dans un peignoir moelleux, la trentenaire s'était dirigée vers la cuisine pour y déguster son café matinal. Cette parenthèse fermée, elle s'était comme à son habitude rapidement préparée, pouvant aujourd'hui bénir l'existence du concealer qui dissimulait avec brio son état de fatigue actuel. Après avoir eu le droit au rituel des embouteillages Séoulites, la Coréano-Chinoise s'était engouffrée dans le lieu qu'elle détestait le plus au monde. Elle saluait ses « collègues » sans réellement s'attarder, de toute façon qu'avait-elle à échanger avec ces derniers ? Rien, et ce même sur le plan scientifique malgré leur potentiel indéniable, Lan n'en n'avait tout bonnement pas l'envie. Elle avait déjà pactisé avec le diable, pas besoin de faire ami-ami avec ses sbires...

Arrivée à destination, soit son bureau, la brune s'était installée pour relire ses notes de la veille. Elle put également apercevoir une note qui lui était adressée posée en évidence sur son dessus de table. Un nouvel arrivant avait été intégré la veille et elle était chargée de son accueil. Encore une pauvre âme privée de ses souvenirs au nom de la science, comment vouliez-vous qu'elle parvienne à trouver le sommeil après ça ? À peine le temps d'en lire plus sur celui qu'elle allait recevoir qu'elle entendit plusieurs coups frappés sur la porte en métal. Après avoir enjoint le personnel à entrer, elle se releva pour se placer à côté de son bureau. Les deux hommes accompagnant le cobaye avaient de bien belles décorations sur le visage. Et si elle n'était pas tenue de ne pas ouvertement désavouer tout ce cirque auquel elle prenait part, un petit sourire en coin se serait bien peint sur les lèvres de la fleur. Toutefois, elle conserva son professionnalisme et fit signe aux deux gorilles qu'ils pouvaient disposer après que l'on lui ait remis la clef des menottes qui enserraient les poignets de celui qui le dépassait d'une bonne tête.

Plongée dans le dossier du nouvel arrivant, Ares de ce qui était écrit, elle releva la tête au son de sa voix grave et inquisitrice. Les prunelles posées sur son cadet, elle put lui répondre non sans une once d'ironie désabusée dans la voix. « Très probablement l'un de vos pires cauchemars. Enfin …. vous croiserez sûrement bien pire que moi ici. » Elle s'approcha prudemment de lui et lui libéra les poignets. « Ce sera sans doute plus agréable pour vous... Toutefois, gare à vos gestes, sinon je rappelle les gorilles de tout à l'heure... ». Lan ne donnant pas cher de sa peau si le jeune homme se mettait à la corriger, pour sûr qu'il parviendrait même affaibli à la tuer à main nue. Il n'y avait qu'à regarder les muscles visibles de ça et là rouler nerveusement sous la peau hâlée du brun. Elle étendit élégamment la main en direction du siège qui faisait face au sien à son bureau. « Mais je vous en prie, installez-vous, vous faire rester debout dans votre état n'est pas réellement indiqué... »

Elle même assise, elle put poursuivre. « Pour reprendre sur votre question, je suis une scientifique, ou du moins une neurochirurgienne-chercheur de métier pour être précise, chargée de mener des expérimentations sur vous. Je ne sais pas si ça peut un peu vous consoler, bien que cela étonnerai, mais vous faites partie du grand projet de la Clover Corp destiné à poursuivre le pompeux... »Le terme péjoratif avant glissé bien malgré elle de ses lèvres, lapsus révélateur comme on dit. « … Objectif d'atteindre la vie éternelle. Oui monsieur Ares juste ça. » Elle se servit un verre d'eau et en fit de même pour le jeune homme face à elle, libre à lui de boire ou non. « Vous pouvez m'appeler docteur Sagong, mais si vous n'êtes pas pour les titres honorifiques, Mlle Sagong pourra également parfaitement parvenir. » Pour tout dire, plus le temps passait et plus la brune avait du mal à être qualifiée de docteur au vu de ses agissements.

Laissant un temps à son vis-à-vis de digérer les informations transmises, elle put parcourir son dossier qu'elle pourra relire lorsqu'il ne sera plus là. Pour l'heure, elle préférait observer ses réactions en parallèle de sa lecture, après tout, il n'était pas rare que des sujets d'expérimentation deviennent violent après cette première phase. Il n'était pas exclu non plus que certains perdent définitivement la raison, le procédé d’effacement des souvenirs de ces derniers étant hautement invasifs, la neurochirurgienne grinçant des dents à chaque fois qu'elle pouvait observer l'étendue des dégâts....

Bien que ne voulant pas le brusquer, elle ne pouvait se permettre de perdre plus de temps et se devait de réaliser une auscultation moins sommaire que l'on lui avait présentée dans ce dossier qui n'était qu'une introduction à ce qui allait suivre. « Me donnez vous l'autorisation de vous ausculter monsieur Ares ? » Après tout, ce n'était pas parce qu’ils étaient des cobayes probablement voués à disparaître qu'il ne fallait pas faire preuve d'un peu d'Humanité ...

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Les deux gardes n'ont pas mis si longtemps que cela à déguerpir et je ne m'en porte que mieux. Mon regard avisé n'a pas cessé d'observer le moindre geste de la femme dans sa blouse. Certes, elle ne ferait définitivement pas le poids face à moi vu nos gabarits, mais ma méfiance augmenta d'un cran lorsqu'elle s'approcha avec les clés. Les poignets de nouveau libre, mes bras se logent aussitôt le long de mon corps. Des réponses pour le moins étranges arrivent enfin jusqu'à mes oreilles, ou tout du moins un début. L’évocation d'un cauchemar n'est en rien agréable à envisager. Le ton qu'elle a utilisé me laisse tout autant songeur, comme s'il y avait quelque chose qui cloche. La menace coule sans faire réellement d'effet. Invité à m'asseoir, après vérification, je décide de prendre place sur la chaise alors qu'elle fait de même de l'autre côté du bureau.

Toujours pas à l'aise, j'écoute tout ce qu'elle raconte ensuite avec...un étrange calme olympien. Ne devrais-je pas hurler de colère ou même de peur ou encore pleurer. Aucune émotion de ce genre ne semblait monter à l’intérieur. N'ayant pas la moindre idée de ce que peut bien être une neurochirurgienne, je constate que la Clover Corps ne m'est pas du tout connu. Je n'ai pas la moindre ce que qu'ils sont, mais une chose est sûre, vu cet endroit, rien de bon en perspective. Encore moins l'idée de devenir un sujet d'expérience... Quant à la vie éternelle, dans mes prunelles, une lueur d'incrédulité se met à les remplir. Est-ce que je serais en train de faire un rêve étrange ? Non, impossible, les douleurs, les odeurs, tout était trop réel pour être tiré de mon cerveau endormi. Un second verre est rempli à mon intention, d'un geste de la main, il se voit reculé. Je ne compte pas boire là-dedans après tout ce qu'elle vient de sortir.

Ensuite, elle ouvre des documents et se met à les lire. Cela me laisse encore du temps afin d'organiser mes pensées comme je peux. « Je n'ai pas la moindre idée de ce dont vous parlez, certains mots que vous employez me sont inconnus. Qu'est-ce qu'une neurochirurgienne au juste ? Qu'est-ce que vous entendez par faire des expériences sur moi ? » Il y en aurait bien plus à poser, néanmoins je lui donne le temps de répondre, vu qu'elle semble disposée à le faire. Enfin, je crois. Mon regard se pose sur sa blouse, je ne sais pas pourquoi, ce blanc ne me rassure pas. Elle me pose une question ensuite. Ne sentant aucune malveillance, ma tête bouge afin d'affirmer que c'est possible. Puis d'un geste de la main, je suis invité à m'installer sur une table d’auscultation, ce que je fais. C'est frais. Mes yeux se portent autour, essayant de trouver un détail, quelque chose qui pourrait bien m'aiguiller sur ce qui se passe entre ses murs. Mais rien d'intéressant n'est à observer.

Au bout d'un nouvel instant de silence, de nouveaux mots s'échappent de mes lèvres. « Pourquoi est-ce que je ne parviens pas à me souvenir de quoi que ce soit avant ce matin où j'ai atterri ici ? Qui suis-je ? Comment suis arrivé ici ? C'est quoi cette Clover Corp ? » Dis-je d'un ton assez calme à nouveau. Au final, j'avais tout balancé. Espérons que ses réponses ne donneront pas naissance à d'autres interrogations, ce dont je doute clairement. À pouvoir la voir de plus près, rien non plus me m'indique que je la connais. C'est également le cas avec tous les visages que j'ai croisé jusqu'à présent. Un vrai black-out. Ma peau frissonne légèrement lorsque le stéthoscope l'effleure. Ce n'est pas douloureux, mais ça n'est pas forcément très agréable non plus. Néanmoins, il est au programme de surveiller ce qu'elle fait, comme si c'était une question de survie qui s'inscrit au fond de mes tripes.

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Ares & Lan

Peu rassurée devant le gabarit du cobaye, Lan avait préféré être claire en le libérant de ses entraves. Toutefois, la mise en garde n'avait guère fait sourciller le plus jeune. Il faut dire qu'il avait déjà bien commencé à leur refaire le portrait, alors les craindre …. Enfin, la neurochirurgienne espérait bien ne pas avoir à les rappeler et pouvoir ausculter le brun sans heurt. Par chance, Lan n'avait jamais eu à faire à un sujet retords et n'avait reçu que quelques insultes tout au plus au visage. Connaissant son caractère, elle sait qu'elle ferait bien pire elle-même. Après tout, lutter pour sa survive n'est-il pas le premier fondamental animal ? L'autre fini par obtempérer et s'installe sur la chaise en face d'elle et l'écoute avec un calme olympien. Ironique lorsque l'on connaît le surnom qu'on lui a donné. Mais là n'était pas l'heure de faire de l'humour douteux …

Le nez plongé dans le dossier du jeune homme, elle le laisse digérer les informations dont elle l'a bombardé. Et comme à chaque fois, ce sont encore des termes différents qui ont disparus de la mémoire de celui qui a été quelqu'un. La fleur attrape un calepin et griffonne rapidement quelques notes afin de pouvoir comparer ces données avec celles qu'elle avait déjà relevées pour ses recherches plus... personnelles ? Les notes prises, elle relève la tête pour pouvoir s'adresser à nouveau à lui. « Oh pardonnez-moi, ce n'était pas mon intention de vous rendre confus. » Elle marqua un temps d'arrêt, tentant de trouver les mots pour exposer le plus simplement possible son métier. « Pour mon métier, nous allons dire qu'avec ce dernier nous pouvons aider à '' réparer'' un cerveau et à mieux comprendre son fonctionnement. » L'idée était fort schématisée, voire presque enfantine, la Coréano-Chinoise espérant qu'elle n'avait pas prit sans le vouloir un ton infantilisant que certains de ses confrères apprécient tout particulièrement.

« Quant au fait de réaliser des expériences sur vous... » Un soupir glissa hors de ses lèvres bien malgré elle. « On peut y faire rentrer un bon nombre de choses, mais je préfère vous mettre en garde..... Ce ne seront pas des parties de plaisir pour vous. » Elle ravala sa salive avant de poursuivre. « Mes paroles valent ce que vous voulez, et libre à vous de me croire ou non. Mais en ma présence, je vous assure que je ferai toujours mon possible pour que vous n'ayez pas à souffrir ou alors le moins possible... » Quelle grandeur d'âme n'est-ce pas ? La fleur avait envie de hurler en prononçant ces paroles. Faire souffrir ceux que l'on avait juré de soigner, c'était marcher sur la tête.... « Enfin... je suppose que vous comprendrez mieux lorsque les expériences auront débuté. » Et au vu de la carrure du fameux Ares, pour sûr que la queue allait être longue pour pouvoir expérimenter sur lui. Un sujet sain et en parfaite forme physique, ce n'est pas aussi facile à trouver que ça entre le tabagisme, l'alcool, la junk food et la sédentarité moderne.

Elle avait ensuite invité son cadet à se laisser ausculter. Coopératif, il avait acquiescé et s'était installé sur la table d'auscultation. Tandis que Lan écoute les battements presque trop calmes de l'autre, elle se fait également la remarque qu'elle ne l'a pas vu avoir tant de gestes parasites que ça lorsqu'il se tenait debout tout à l'heure. Simple réaction post-traumatique au lessivage de cerveau qu'il avait subit, ou serait-ce de la mémoire musculaire ? Lan penchait et espérait même que ce soit la seconde proposition, le corps étant une formidable machine. Et celle de ce mystérieux Ares semblait avoir vécu un bon nombre d'histoires ….

C'est alors que le silence fut à nouveau troublé par de nouvelles questions du jeune homme. Des questions qui n'auront hélas vocation qu'à en attirer de nouvelles pour lui. « Ça fait beaucoup de questions dites-moi. » Lan tentant tant bien que mal la carte de l'humour pour tenter de détendre un tantinet son cadet, en vain. Après tout, qui le serait dans ce genre de situation ? « On a effacé vos souvenirs avec l'aide d'un sérum élaboré par la Clover Corp dont la composition est tenue secrète. » Un fait qui chagrinait Lan qui aurait aimé en savoir plus sur la composition de ce naufrageur de mémoire. Mais l'institution ne jugeait pas utile de le faire, voir ne lui faisait déjà plus entièrement confiance, ce qui ne l'étonnait guère, ne se trouvant pas entre ses murs par sa propre volonté. « Pour la Clover Corp, retenez que c'est l'organisation qui a fait de vous un cobaye et qui fait des recherches sur vous et vos semblables pour lutter contre diverses maladies et même ...la mort. » Un projet fou et mégalo, mais là n'était pas le moment de s'épancher sur ses avis.

« Pour vos deux autres questions, je ne suis hélas pas en mesure de vous apporter de réelles réponses. Tout ce que je sais de votre identité, c'est ce qui est noté dans votre dossier, soit le pseudonyme que l'on vous a accordé, Ares et qu'il semblerait que vous soyez âgé de 27 ans. » En règle général l'âge moyen des cobayes ramené se situait entre 20 et 30 ans, âges auxquels nous sommes en pleine possession de nos moyens et supposés être dans notre meilleure forme. « Quant au comment on va ramené ici, je ne suis également pas très au fait, mais je suppose qu'on vous a traqué alors que vous aviez encore vos souvenirs et que l'on a réussi à vous neutraliser avant de vous ramener ici. Pour la Clover Corp, un homme comme vous jeune et en excellente condition physique, c'est du pain béni. » Elle marqua un temps de pause en passant au dos du plus jeune. « Peut-être même que vous aviez des contentieux avec quelqu'un et qu'il a cherché à se débarrasser de vous, allez savoir... »

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Cette discussion est pour le moins surréaliste et démente. Cette froideur ambiante n'était pas rassurante, loin de là. Plus les mots sortaient de ces lèvres rouges, plus mon esprit était perdu. Après m'avoir éclairci sur ce que sont les neurochirurgiens, elle se met à inscrire des symboles sur une des feuilles devant elle. « Une médecin de la tête donc. Je vois. » Mes yeux se plissent légèrement en tentant de les déchiffrer, mais sans succès. Il me faut donc arrêter quand la discussion reprend ensuite, mes mains se posant sur mes cuisses machinalement. Encore plein de mots qui ne mènent pas à grand-chose. Elle semble vouloir me convaincre qu'elle évitera de me blesser, mais cela sonne creux à mes oreilles et mes prunelles froides parlent pour moi. « De toute manière, ce n'est pas comme si j'avais le choix, pas vrai ? » Dis-je, plus comme une constatation que véritable interrogation.

Il ne me fallait surtout pas perdre l'autorisation de déambuler où j'ai envie, sinon impossible d'enquêter et de trouver quoi que ce soit. La suite se déroule sur la table d'auscultation. Mes nouvelles questions posées, elle se donne à nouveau la peine de me répondre. Mes prunelles se reposent à nouveau sur elle, surveillant ses gestes. Encore cette Clover Corp, décidément, elle était partout. Trop. Un sérum doit être quelque chose qu'on nous donne pour faire oublier, et la composition, une espèce de recette. Après, déterminé si elle n'y avait pas accès, c'était une autre perte de manche. Je n'étais qu'un type sans souvenir après tout. « C'est toujours obscur, néanmoins cette clover ne m'inspire que du mépris. Ils mériteraient de se retrouver ici, à jouer les cobayes à nos places si c'est si important que ça. » Dis-je, d'une voix pourtant très… calme.

Invité à me pencher vers l'avant, je m’exécute à nouveau, sentant son instrument froid sur mon dos à présent. Mes muscles se tendent légèrement à nouveau, je les sens, sans que je ne leur demande quoi que ce soit. « C'est un drôle de nom, Ares. » Sans savoir que c'était sûrement à cause du dieu en question sur une de mes épaules. Il semble que les autres cobayes ont reçu un nom composé d'un mot unique. La description qu'elle fit de cette traque ressemblait à une chasse, ni plus ni moins. Déterminer la vérité devient encore plus une priorité. Si elle ne ment pas et qu'elle ne sait rien, alors il doit y avoir d'autres qui sont plus au courant. Des preuves quelques part, un indice, n'importe quoi. Il ne me faut pas oublier mon but principal, sortir d'ici. Une fois dehors, je pourrais trouver. En entendant, la coopération, dans la mesure du possible, demeure ma meilleure chance et le meilleur moyen de tromper leur vigilance.

Invité à prendre place assis sur le bord du lit, les jambes pliées dans le vide, elle s'approche avec un nouvel instrument. Pas très grand, bien qu'il ne me semble pas dangereux. Avec, elle tape au niveau de mon genou, ma jambe se tendant un peu à la suite. Perplexe quant à ce phénomène, mes lèvres ne peuvent pas s'empêcher de laisser couler de nouveaux mots. « Qu'est-ce que vous faites au juste ? » Légère pause. « Cette réaction est-elle normale ? On aurait dit que ma jambe faisait ça toute seule. » Sûrement un effet de ma mémoire absente, je devais avoir su ce que c'était avant. Mais certaines choses me paraissaient parfois totalement nouvelle, créant ce décalage.

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Les mots prennent enfin sens pour l'autre. Il fallait dire qu'il était toujours compliqué de savoir à quel point le sérum pouvait affecter les souvenirs. À vrai dire, Lan était même dubitative devant pareil résultat avec une seule injection. Si l'on lui avait demandé comment effacer une mémoire, elle aurait répondu avec des séances d'hypnose, d’auto-persuasion, de la sédation ou alors une puce inhibant l’hippocampe . Toutefois, aucune de ces solutions n'auraient fonctionné à 100% , pas avec une efficacité aussi radicale. Enfin, ce n'est pas pour autant que l'on avait accordé à la scientifique de se voir communiquer la liste des composants de ce cocktail explosif. Parvenir à produire pareille substance, mais voir le reste des recherches stagner... était-ce encore là une erreur inexplicable ? Sans doute.

Mais, là n'était pas la question. Une fois de plus, une autre âme s'était résignée à subir, que trop bien lucide quant à ce qui l'attendait des ces couloirs de l'horreur au mieux, de la mort au pire. À moins que ce ne soit l'inverse, Lan ne savait plus trop quel sort était le plus enviable pour les cobayes, la mort ou alors une vie faite de souffrance et d'errance ? Elle ne répondit rien, préférant simplement opiner du chef. Qu'il y avait-il à ajouter de toute façon ? Certes Ares n'avait plus ses souvenirs, mais il semblait qu'il était resté avisé. Une attitude sage qui lui permettrait de faire défiler ses années au compteur, enfin du moins si il ne recommence pas un nombre trop important de fois à abîmer des gardes. Enfin, qui pourrait bien le blâmer d'exprimer avec ses mots et ses poings son mépris ? …

En pleine auscultation, le nom d'emprunt dont on l'a affublé semble attirer l'attention de celui dont les muscles roulent sous sa peau. Elle s’interrompit un instant afin de pouvoir lui répondre plus posément. « Arès, dieu de la guerre offensive et de la destruction dans la mythologie grecque. » Sa main gantée désignant ensuite l'une des épaules bien bâties du plus jeune. « Il semblerait que c'est à cause de ce tatouage que vous avez hérité de ce surnom. Peut-être que le sujet de la mythologie était l'un de vos centres d'intérêt. Enfin, ce ne sont que des suppositions bien sûr.... ». La Clover Corp se gardant bien de distribuer toute information au sujet de l'ancienne vie de ses précieux cobaye aux souvenirs lavés.

Elle poursuivit ensuite son auscultation. Bien sûr, Ares l'avait questionné une nouvelle fois sur le drôle de manège qui se déroulait sous ses yeux. « Avec l'outil que j'ai en main, je viens tester vos réflexes rotuliens. » posant sa main gantée sur la zone elle en dessine les contours imaginaires. « Ici se trouve votre rotule qui vous permet de plier votre jambe. Et vos muscles et vos nerfs ont prouvé que votre système moteur et nerveux sont tout à fait sains. Donc oui cette réaction est tout à fait normale et de fait attendue. Les réflexes sont la base du règne animal, ça fait des millions d'années que l'on survit grâce à eux. »

Se reculant de quelques pas, la neurochirurgienne coche sa tcheck liste imaginaire. Elle n'avait rien oublié, ou du moins, rien qui n'avait pas été indiqué dans le dossier du cobaye. « Nous en avons fini pour aujourd'hui je pense. Vous pouvez vous relever de sur la table d'auscultation... » La fleur se dirigeant pour sa part jusqu'à son bureau afin de prendre rapidement des notes. Hélas pour elle, son dictaphone avait décidé pour aujourd'hui de lui fausser compagnie. Une perte de temps pour taper des compte-rendus en temps et en heure. D'ailleurs, en parlant d'heure..... Son regard avait bifurqué sur l'horloge murale qui indiquait qu'il allait bientôt être l'heure de recevoir un autre cobaye qui s'était montré peu coopératif ces derniers temps. Lan avait un mauvais pressentiment, mais que pouvait-elle bien y faire ? Elle allait devoir faire front, sûrement qu'une bonne tasse de café l'y aiderait.

Relevant la tête vers le jeune homme. « J'allais vous proposer machinalement un café avant que vous ne partiez, mais au vu de votre refus avec mon verre d'eau je passe mon tour. » Lan ne se gênant pas elle, pour allègrement avaler le noir breuvage salvateur avant de se saisir des menottes d'Ares. « Pardonnez-moi, mais la procédure veut que vous les ayez de nouveau aux poignets avant le retour des gardes au vu de vos précédents exploits de lutte. » Ne désirant pas brusquer le cobaye, la fleur avait ensuite doucement passé les entraves sur les poignets de son cadet avant de serrer juste ce qu'il faut, il n'était nullement le but de blesser plus l'autre. « Il faudrait faire changer vos pansements également, j'aurais aimé le faire, mais je suis pressée par le temps.... » Elle releva ensuite la tête pour pouvoir faire face à ce géant. Mais ce ne fut que le silence qui s'installa, à quoi bon lui souhaiter une bonne journée. Ensuite, ce moment de flottement fut bien vite écourté, les gardes étant déjà fidèles au poste....

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La consultation suivait son chemin, orchestrée par la femme médecin. J'avais décidé de coopérer, il fallait donc que je lui prouve en continuant. Encore une fois, une nouvelle remarque franchit mes lèvres avant même de réfléchir réellement à propos de mon nom de cobaye. Peut-être était-ce une conséquence normale que de vouloir s'enquérir auprès de celle qui sait tout, contrairement à moi. De la même manière que depuis le début, elle se donna la peine de me répondre, précisant qu'il s'agissait d'un dieu de la guerre et que ça devait sûrement avoir un rapport avec un de ces dessins qui recouvrait ma peau. Lorsqu'elle indiqua lequel avec la main, mon regard intrigué se reposa sur le dieu tatoué en question. Les explications ne firent pourtant resurgir aucun souvenir. De toute manière, j'avais eu beau les scruter depuis mon arrivée, ils ne m'avaient rien révélé. « Un dieu de la guerre vous dites… J'aimerai bien avoir les mêmes capacités, cet endroit serait rayé de l'histoire du monde en un claquement de doigts. » Mais j'en doutais sérieusement qu'elles étaient offertes avec le nom.

Ensuite, mon attention s'était focalisée sur le réflexe de mon genou comme la doctoresse avait appelé ça. Ce n'était donc pas une mauvaise chose en soit, enfin je supposais. J'étais donc en pleine possession de mes moyens, ce qui me fit m'interroger sur les circonstances m'ayant amené dans cette prison encore une fois. Enfin cette fois, je me gardais bien de le dire à haute-voix, puisqu'elle m'avait déjà affirmé ne rien savoir. Pour le moment, je ne pouvais être sur de rien. Elle ne me paraissait pas mal intentionnée en soit, mais je ne pouvais pas me fier à une impression. Pas n'étant pas moi-même et sans défense. « Je vois. » Dis-je, en opinant du chef. Mon regard accompagna son mouvement de main alors qu'elle prenait des notes. Le moment s'était terminé plus vite que prévu et ce fut un vrai soulagement que de me retrouver autorisé à me relever.

Ma tenue correctement remise, mes pas me rapprochèrent du bureau puisque c'était là qu'elle se tenait à présent.Le fait qu'elle reparle de mon refus me laissa songeur, l'avait-elle mal pris ? Elle ne se gêna pas en tout cas pour boire le sien. « Ce n'est pas contre vous. » Déclarais-je, de mon ton calme. Alors qu'elle m'annonçait que mes menottes allaient devoir être remises par souci de sécurité, je lui facilitais la tâche en les tendant devant elle. Après tout, il me restait une foule de choses à penser. Beaucoup d'informations m'avaient été apportés, il me fallait encore le temps de les digérer. M'installant ensuite sur le seul autre siège, ce qu'elle rajouta me fit reposer les yeux sur elle. « J'ignore si cela est de mon ressort, mais je demanderais. » Après tout, je n'étais qu'un cobaye, ce n'était pas dans mes capacités d'obliger l'infirmier à changer mon pansement. En arrivant, un des gardes tira sur mes entraves pour m'obliger à m'avancer, ce qui provoqua un rapport de force, épaule contre épaule, alors que je me faisais tirer à l'extérieur sans avoir eu le temps de saluer la femme médecin. Tant pis.